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vendredi 1 octobre 2010
Georges Bataille ou les Larmes d'Eros
«De même que l'horreur est la mesure de l'amour, la soif du mal est la mesure du bien.»
«L'érotisme est dans l'approbation de la vie jusque dans la mort.» (G. Bataille - La Littérature et le Mal).
« Ce qui m'oblige d'écrire, j'imagine, est la crainte de devenir fou » (G.Bataille)
«Ce qui, le plus violemment, nous révolte, est en nous.» (G. Bataille - L'Erotisme)
Georges Bataille, né à Billom dans le Puy-de-Dôme en 1897, est mort à Paris en 1962. Sa vie se confond avec la recherche d'une vérité qui serait le dépassement de toute vérité. De 1925 jusqu'à sa mort, il connaît tous les mouvements intellectuels, littéraires et philosophiques de son temps. Son oeuvre fait voler en éclat les divisions traditionnelles entre philosophie, poésie, roman, méditation religieuse, et comporte des essais, des poèmes, des romans parmi lesquels Histoire de l'oeil (1928), L'Expérience intérieure (1943), Le Coupable (1944), Sur Nietzsche (1945), La Haine de la poésie (1947), La Part maudite (1949), Le Bleu du ciel (1957), L'Érotisme (1957), Le Procès de Gilles de Rais (1959), Les larmes d'Éros (1961), Ma mère (publication posthume en 1966).
Fasciné par le rituel de sacrifice humain, il s'amusait dans les cafés parisiens à montrer les photographies de ces sacrifices aux personnes venant s'attabler. Cette fascination l'amena à fonder Acéphale, une revue d'inspiration nietzschéenne mais aussi une société secrète visant à créer « la communauté de ceux qui n'ont pas de communauté ».
Ce fut en 1950 qu'il assista aux corridas de Nîmes, accueilli par André Castel, un bibliophile, grand aficionado et œnologue nîmois dont son ami Michel Leiris[9] avait fait la connaissance en 1938. Outre Georges Bataille, le couple Leiris entraînait chez Castel Jean Dubuffet, André Masson, Jean Paulhan et Blaise Cendrars, Jean Cocteau et ses riches amies mais aussi Pablo Picasso.
Le Nîmois, que tous appellent Don Misterio, les recevait dans la cour de son laboratoire d’œnologie, parmi des toreros célèbres, des danseuses et des chanteurs de flamenco. En dépit de l’épisode Dora Maar, les relations entre Bataille et Picasso n’avaient que peu souffert. Celui-ci arrivait avec sa compagne Françoise Gilot, qui avait remplacé la célèbre photographe, et le couple Georges-Diane filait le parfait amour. De plus, leur passion taurine gommait tout.
L’Histoire de l'œil qu’il écrivit vers 1926, développa le thème de ce fantasme morbido-sexuel. Considérant la corrida comme un rituel et reliant la tauromachie à son appréhension personnelle de l’univers comme confrontation de forces, Bataille intellectualisa son aficion vers un mythe mithriaque qu’il développa dans son Soleil pourri.
Les Larmes d'Eros :
"Le sens de ce livre est, en un premier pas, d'ouvrir la conscience à l'identité de la "petite mort" et d'une mort définitive. De la volupté, du délire à l'horreur sans limites. C'est le premier pas nous menant à l'oubli des enfantillages de la raison ! De la raison qui jamais ne sut mesurer ses limites. Ces limites sont données dans le fait qu'inévitablement la fin de la raison, qui excède la raison, n'est pas contraire au dépassement de la raison ! Par la violence du dépassement, je saisis, dans le désordre de mes rires et de mes sanglots, dans l'excès des transports qui me brisent, la similitude de l'horreur et d'une volupté qui m'excède, de la douleur finale et d'une insupportable joie !"(Georges Bataille)