mardi 24 novembre 2009

Baudelaire et Michael Hussar







L'Héautontimorouménos par Baudelaire

Je te frapperai sans colère
Et sans haine, comme un boucher,
Comme Moïse le rocher !
Et je ferai de ta paupière,

Pour abreuver mon Saharah,
Jaillir les eaux de la souffrance.
Mon désir gonflé d'espérance
Sur tes pleurs salés nagera

Comme un vaisseau qui prend le large,
Et dans mon cœur qu'ils soûleront
Tes chers sanglots retentiront
Comme un tambour qui bat la charge !

Ne suis-je pas un faux accord
Dans la divine symphonie,
Grâce à la vorace Ironie
Qui me secoue et qui me mord ?

Elle est dans ma voix, la criarde !
C'est tout mon sang, ce poison noir !
Je suis le sinistre miroir
Où la mégère se regarde !

Je suis la plaie et le couteau !
Je suis le soufflet et la joue !
Je suis les membres et la roue,
Et la victime et le bourreau !

Je suis de mon cœur le vampire,
- Un de ces grands abandonnés
Au rire éternel condamnés,
Et qui ne peuvent plus sourire !
_________________
Illustrations de Michael Hussar.



Lautréamont


"Moi, comme les chiens, j'éprouve le besoin de l'infini... Je ne puis, je ne puis contenter ce besoin ! Je suis fils de l'homme et de la femme, d'après ce qu'on m'a dit. Ça m'étonne...je croyais être davantage ! Au reste, que m'importe d'où je viens ? Moi, si cela avait pu dépendre de ma volonté, j'aurais voulu être plutôt le fils de la femelle du requin, dont la faim est amie des tempêtes, et du tigre, à la cruauté reconnue : je ne serais pas si méchant. Vous, qui me regardez, éloignez-vous de moi, car mon haleine exhale un souffle empoisonné. Nul n'a encore vu les rides vertes de mon front ; ni les os en saillie de ma figure maigre, pareils aux arêtes de quelque grand poisson, ou aux rochers couvrant les rivages de la mer, ou aux abruptes montagnes alpestres, que je parcourus souvent, quand j'avais sur ma tête des cheveux d'une autre couleur. Et, quand je rôde autour des habitations des hommes, pendant les nuits orageuses, les yeux ardents, les cheveux flagellés par le vent des tempêtes, isolé comme une pierre au milieu du chemin, je couvre ma face flétrie, avec un morceau de velours, noir comme la suie qui remplit l'intérieur des cheminées : il ne faut pas que les yeux soient témoins de la laideur que l'Etre suprême, avec un sourire de haine puissante, a mise sur moi. Chaque matin, quand le soleil se lève pour les autres, en répandant la joie et la chaleur salutaires dans toute la nature, tandis qu'aucun de mes traits ne bouge, en regardant fixement l'espace plein de ténèbres, accroupi vers le fond de ma caverne aimée,dans un désespoir qui m'enivre comme le vin, je meurtris de mes puissantes mains ma poitrine en lambeaux. Pourtant, je sens que je ne suis pas atteint de la rage ! Pourtant je sens que ne suis pas le seul qui souffre ! Pourtant je sens que je respire ! Comme un condamné ... qui va bientôt monter à l'échafaud, debout, sur mon lit de paille, les yeux fermés, je tourne lentement mon col de droite à gauche, pendant des heures entières ; je ne tombe pas raide mort. De moment en moment [...] je regarde subitement l'horizon, à travers les rares interstices laissés par les broussailles qui recouvrent l'entrée : je ne vois rien ! Rien ... si ce ne sont les campagnes qui dansent en tourbillons avec les arbres et avec les longues files d'oiseaux qui traversent les airs. Cela me trouble le sang et le cerveau... Qui donc, sur la tête, me donne des coups de barre de fer, comme un marteau frappant l'enclume ? "



"Il existe une convention peu tacite entre l'auteur et le lecteur, par laquelle le premier s'intitule malade, et accepte le second comme garde-malade. C'est le poète qui console l'humanité! Les rôles sont intervertis arbitrairement."


"J'ai vu, pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leur semblables, et pervertir les âmes par tous les moyens. Ils appellent les motifs de leurs actions: la gloire."

"Moi, si cela avait pu dépendre de ma volonté, j'aurais voulu être plutôt le fils de la femelle du requin, dont la faim est amie des tempêtes, et du tigre, à la cruauté reconnue: je ne serais pas si méchant."

dimanche 23 août 2009

Dante



Dante Alighieri, le grand poète italien, est né à Florence en 1265 ; il fut exilé pour avoir pris part aux luttes intestines de sa patrie et mourut à Ravenne en 1324.

La vie de Dante a été tant de fois écrite depuis Boccace, Villani et Benvenuto da Imola jusqu'à nos jours, qu'on ne peut que répéter ce que savent déjà tous ceux qui se sont un peu occupés de ce grand poète. Il naquit à Florence au mois de mars 1265, d'Alighiero degli Alighieri et de sa femme Bella. Son vrai nom était Durante, dont Dante est l'abréviation. Il rappelle lui-même, en s'en glorifiant, l'origine noble de ses ancêtres , bien qu'en parlant d'eux il déclare ne vouloir pas remonter au delà de Cacciaguida dont le fils Alighiero ou Aligiero, prit le nom de sa mère, de la famille des Aldighieri de Ferrare, et ce nom d'Alighieri fut adopté par tous les descendants de Cacciaguida.

Dante était encore dans l'enfance lorsqu'il perdit son père. Vers ce temps, une circonstance fortuite fit naître en lui la passion, si connue, qui eut tarit d'influence sur sa vie entière. Nous empruntons le récit de Boccace :

« C'était le 1er de mai, jour où, selon la coutume, Folco Portinari, homme en grande estime parmi ses concitoyens, avait rassemblé chez lui ses amis avec leurs enfants. Dante, alors âgé de neuf ans seulement, était du nombre de ces jeunes hôtes. De cette joyeuse troupe enfantine faisait partie la fille de Folco, dont le nom était Bice. Elle avait à peine atteint sa huitième année. C'était une charmante et gracieuse enfant, et de séduisantes manières. Ses beaux traits respiraient la douceur, et ses paroles annonçaient en elle des pensées au-dessus de ce que semblait comporter son âge. Si aimable était cette enfant, si modeste dans sa contenance, que plusieurs la regardaient comme un ange. Cette jeune fille donc, telle que je l'ai décrite, ou plutôt d'une beauté qui surpasse toute description, était présente à cette fête. Tout enfant qu'était Dante, cette image se grava soudain si avant dans son cœur, que, de ce jour jusqu'à la fin de sa vie, jamais elle ne s'en effaça. Était-ce entre deux cœurs un lien mystérieux de sympathie, ou une spéciale influence du ciel, ou était-ce, comme quelquefois l'expérience nous le montre, qu'au milieu de l'harmonie de la musique et des réjouissances d'une fête, deux jeunes cœurs s'échauffent et se portent l'un vers l'autre? Il n'importe; mais Dante, en cet âge tendre, devint l'esclave dévoué de l'amour. Le progrès des années ne fit qu'accroître sa flamme, et tant, que pour lui nul plaisir, nul confort, que d'être près de celle qu'il aimait, de contempler son beau visage, et de boire la joie dans ses yeux. Tout en ce monde est transitoire. A peine Béatrice avait-elle accompli sa vingt-cinquième année, qu'elle mourut .
A son départ, Dante ressentit une affliction si profonde, si poignante, il versa tant et de si amères larmes, que ses amis mirent qu'elles n'auraient d'autre terme que la mort seule, et que rien ne pourrait le consoler . »

Ce funeste événement contribua peut-être à développer en lui le fonds de mélancolie qu'il semble avoir apporté en naissant. Quoi qu'il en soit, jamais Béatrice ne sortit de son souvenir. Il la célébra dans ses premiers, vers pleins d'amour et de douleur, et l'immortalisa dans le poème devenu l'immortel monument de sa propre gloire.


Brunetto Latini, renommé par ses deux ouvrages, le Tesoro et le Tesoretto, fut son premier guide dans l'étude des lettres et de la philosophie. Ce fut à ce maître, qui jamais ne cessa de lui être cher, qu'il dut la connaissance des poètes anciens, objets pour lui d'une admiration presque religieuse. Il dut aussi beaucoup à l'amitié de Guido Cavalcanti. Le goût de la peinture et de la musique le lia également avec Giotto, avec Oderici da Gubbio, célèbre par ses miniatures, et avec Casella, qui mit en chant plusieurs de ses canzoni. La science ne l'attira pas moins que les arts et les lettres. Il visita dans sa jeunesse les Universités de Bologne et de Padoue, peut-être durant son exil celles de Crémone et de Naples, mais certainement celle de Paris, où il s'appliqua particulièrement à l'élude de la théologie.

On a dit que, jeune encore, il entra dans l'ordre des Frères mineurs, et qu'il le quitta avant d’avoir fait profession. Mais ce fait, rapporté par un seul biographe, est plus que douteux.

Pressé par ses amis de se marier, il épousa Gemma, de la famille des Donati. Si l'on en croit Boccace, que d'autres contredisent sur ce point, le caractère fâcheux de Gemma. rendit cette union peu heureuse. Dante eut d'elle six enfants, cinq fils et une fille, qui reçut le nom de Béatrice. Elle prit le voile dans le couvent della Uliva de Ravenne. Trois de ses fils moururent jeunes. Pierre, l'aîné, acquit quelque réputation comme légiste, et écrivit, ainsi que son frère Jacopo, un commentaire sur la Divina Commedia.

En des temps aussi agités que ceux où vivait Dante, il était impossible qu'il ne prît pas part aux affaires publiques. Né d'une famille Guelfe, il combattit à Campaldino contre les Gibelins, auxquels, proscrit par ces mêmes Guelfes, il s'unit dans la suite. On le retrouve encore dans la guerre contre les Pisans. Également distingué par sa prudence et sa fermeté, on le consultait avec empressement dans les conjonctures importantes. Suivant quelques-uns de ses biographes, il fut quatorze fois envoyé comme ambassadeur près de différents princes, et, en 1300, du 13 juin au 15 août, on le trouve au nombre des Prieurs, la première dignité de la république. Ce fut la source des malheurs de tout le reste de sa vie.

Jean Villani rapporte ainsi sa mort : « En 1321, au mois de septembre, mourut le grand et vaillant poète Dante Alighieri de Florence, dans la ville de Ravenne en Romagne, après son retour d'une ambassade à Venise pour le service du seigneur de Ravenne, auprès duquel il demeurait. »

Les premières productions de Dante furent des canzoni et des sonnets, entre lesquels on ne saurait établir un ordre chronologique certain.

Il a écrit deux ouvrages latins : De Monarchia mundi, dans lequel il soutient la nécessité de la monarchie et de la séparation du spirituel et du temporel; De Vulgari eloquio, où il s'occupe de rechercher le dialecte italien qui pourrait remplacer le latin. Ses œuvres en italien sont : La Vita nuova, récit de son amour pour Béatrice; Le Convito ou le Banquet, qui est un commentaire de ses canzoni ; mais son chef-d'œuvre, qui est le monument le plus important de la littérature italienne, c'est la Divina Commedia, en trois cantiques, l'Enfer, le Purgatoire, le Paradis. Ce poème est toute une époque. Il peint merveilleusement l'état de la société et de l'esprit humain, du treizième au quatorzième siècle, dans le pays sans aucun doute le plus avancé, alors qu'après un long sommeil agité de rêves terribles, le monde se réveillant semblait pressentir, au milieu des ténèbres déjà moins épaisses, ses lointaines destinées, et que l'Italie, aidée par d'heureuses circonstances, commençait à se dégager des liens de la barbarie.

La Divine Comédie vint, pour ainsi dire, résumer tout le moyen âge avant qu'il s'enfonçât dans les abîmes des temps écoulés.


D'une très grande beauté, La Divine Comédie est un poème sacré et une épopée composés de cent chants répartis en trois parties - l'Enfer, le Purgatoire, le Paradis.

La Divine Comédie, inventaire des crimes et des mérites, établira la géographie intérieure de ce gouffre dans une fresque morale qui "décrira l'univers de fond en comble et assignera à chaque personnage, historique ou mythique, sa place dans l'au-delà ..."

Dans la Divine Comédie, la Terre est fixe au centre de l'Univers. Autour d'elle tournent les neuf cieux :

Les sept cieux des planètes.
Le ciel des étoiles fixes.
Le premier mobile.
Au-delà, se trouve l'Empyrée.

Le Diable est au centre de la Terre. Sa chute a creusé une cavité conique dont l'axe passe par Jérusalem ; c'est l'Enfer, compartimenté en neuf cercles :

Les cinq premiers cercles à l'extérieur de la cité de Dité.
Les quatre derniers cercles à l'intérieur de la même cité.
Un chemin caché mène de la demeure du Diable à une île, diamétralement opposée à Jérusalem, où s'élève le Purgatoire ; celui-ci comprend :

Le rivage de l'île.
L'Antipurgatoire.
Les sept corniches.
Le Purgatoire est surplombé par le Jardin d'Eden.

lundi 25 mai 2009

L'Antichrist/ANTIQUE DOCUMENT VAUDOIS PORTANT LA DATE DE L'AN 1120

L'Antichrist

ANTIQUE DOCUMENT VAUDOIS PORTANT LA DATE DE L'AN 1120
(NDE: 50 ans avant la conversion de Pierre Valdo)
TRADUCTION DE PERRIN ET DE LÉGER
Tiré de Léger, Histoire Générale, etc., part. p. 71 ; ou de Perrin,
Histoire des Vaudois, part. III, p. 225.

L'Antichrist de l'antique traité vaudois, c'est le système religieux catholique romain, son personnel et son culte, le pape et l'idolâtrie dont il est le centre.

CE QU'EST L'ANTICHRIST (NDE: introduction un peu longue)
QUELLES SONT LES OEUVRES DE L'ANTICHRIST
QUELLES OEUVRES DÉCOULENT DES PREMIÈRES (partie à lire)
CHOSES PAR LESQUELLES EST COUVERTE L'INIQUITÉ DE L'ANTICHRIST
DEVOIR DE SEPARATION DU CHRETIEN
SIX INIQUITÉS DE L'ANTICHRIST
CE QU'EST L'ANTICHRIST
(NDE: ou Antéchrist)
Comme la fumée précède le feu, comme la bataille précède la victoire, de même la tentation de l'Antichrist précède la gloire.

L'Antichrist est une fausseté (digne) d'une damnation éternelle, couverte de l'apparence de la vérité et de la justice de Christ et de son Épouse; il est opposé à la voie même de la vérité, de la justice, de la foi, de l'espérance, de la charité, (opposé) à la vie morale et au véritable ministère de l'Église, (celle-ci étant) administrée par de faux apôtres, et défendue opiniâtrement par l'un et l'autre bras (le bras spirituel et le bras séculier).

Ou bien, l'Antichrist est une altération de la vérité du salut, cachée par des objets (choses) matériels et ministériels, ou une frauduleuse contrariété à Christ, à son Épouse et à chaque membre fidèle. Ainsi, il n'est pas une certaine personne spéciale, ordonnée dans un certain degré (grade), ou office, ou ministère, en considérant la chose en général; mais la fausseté elle-même, opposée à la vérité dont il se couvre, et (en même temps) s'orne de beauté et de piété en dehors de l'Église de Christ, de même de Christ, de noms, d'offices, (de passages) des Écritures, de sacrements et de plusieurs autres choses.

L'iniquité de cette sorte, avec ses ministres supérieurs et inférieurs, avec ceux qui la suivent d'un cœur mauvais et aveugle : une telle congrégation, prise ensemble, s'appelle Antichrist, ou Babylone, ou quatrième bête, ou paillarde (prostituée), ou homme de péché, fils de perdition.

Ses ministres sont appelés faux prophètes, ministres de ténèbres, esprit d'erreur, paillarde (prostituée) apocalyptique, mère de fornication, nuages sans eau, arbres d'automne morts et deux fois arrachés, vagues de la mer cruelle, étoiles tombantes (errantes), Balaamites, Égyptiens.

Il est appelé Antichrist, parce que, couvert et orné de (sous) l'apparence de Christ, de l'Eglise et de ses fidèles membres, il s'oppose au salut opéré (fait) par Christ, et administré véritablement dans l'Eglise de Christ, et qu'il se place au rang des fidèles par la foi, par l'espérance et par la charité: à ces divers égards, il se montre contraire par une sagesse mondaine, par de fausses religions et par une bonté feinte, par le pouvoir spirituel, par la tyrannie séculière, par les richesses, par l'honneur des dignités, par les délices et par les plaisirs mondains. Il s'oppose (à Christ, etc.) par ces moyens. C'est pourquoi que chacun sache (1) que l'Antichrist ne peut être accompli ni paraître en aucune manière, sinon lorsque les choses qu'on vient de nommer seront réunies ensemble pour former (faire) un parfait hypocrite et un parfait mensonge, c'est-à-dire lorsque les sages du monde, les hommes religieux, les pharisiens, les ministres, les docteurs, la puissance séculière, avec le peuple, seront réunis ensemble. Alors ils formeront ensemble l'homme de péché et d'erreur entier.

Car, au temps des apôtres, c'est une vérité que l'Antichrist était déjà conçu, mais parce que, n'étant qu'enfant, il lui manqua de ses membres nécessaires, soit intérieurs, soit extérieurs. C'est pourquoi (2) on pouvait le connaître, on pouvait le détruire et l'excommunier plus aisément comme étant ignorant et grossier. Et il était muet, car (3) il n'avait pas la sagesse qui sait raisonner, qui sait s'excuser, qui sait définir, qui sait prononcer des sentences; car il lui manqua des seuls ministres sans vérité et des statuts humains; il lui manqua des hommes religieux extérieurement (en dehors) : en effet, il était bien venu, quant à l'erreur et au péché, mais il n'avait pas (les choses) avec lesquelles il put couvrir la souillure ou la vergogne des erreurs ou du péché. Comme il lui manquait, des richesses et des dotations, il ne put pas prendre à gages des ministres pour lui; il ne put pas (non plus) les multiplier, les conserver, les défendre; car il manqua de puissance ou de pouvoir séculier; il ne put ni forcer ni contraindre personne de la vérité au mensonge (4).
Comme il lui manqua beaucoup (de choses), il ne put ni ébranler ni scandaliser personne par ses solennités. Et ainsi, étant trop tendre et faible, il ne put pas subsister dans l'Église. Mais, croissant en ses membres, c'est-à-dire en ses ministres aveugles et hypocrites et en ses gens (les siens) du monde; et lui-même grandit jusqu'à (être) homme fait dans la plénitude de l'âge, c'est-à-dire jusqu'à ce que les (hommes) spirituels et séculiers et les amis du monde, aveugles en la foi et étant mauvais, se sont multipliés dans l'Église avec tout pouvoir. (l'Antichrist) voulant être invoqué, prié et honoré dans les choses spirituelles et couvrir sa propre majesté, sa malice et ses péchés, a eu recours aux saints et aux pharisiens, en cela, comme il est dit ci-dessous.
Car c'est une extrême iniquité de cacher (couvrir) et orner une iniquité digne d'excommunication, et de vouloir paraître (être) ce qui n'est pas donné à l'homme (d'être), mais qui appartient (convient) à Dieu seul et à Jésus-Christ en tant que médiateur. Enlever (ôter) frauduleusement à Dieu, par rapine, ces choses et les transporter à soi et à ses oeuvres doit être une extrême révolte, comme aussi de régénérer, de pardonner les péchés, de distribuer les grâces du Saint-Esprit, de consacrer (confectionner) Christ, et ainsi des autres (choses) semblables. Et se couvrir dans toutes ces choses du manteau de l'autorité, de la forme des paroles, et tromper par ces choses le peuple ignorant (rustique), imitant (suivant) ce que fait le monde dans les choses qui sont du monde : éloigner aussi de Dieu, et de la vraie foi, et de la régénération (réformation) du Saint-Esprit; éloigner de la véritable repentance, de la persévérance dans le bien; éloigner de la charité, de la patience, de la pauvreté, de l'humilité, et, ce qui est le pire de tout, éloigner de la vraie espérance et la placer en tout mal et en la vaine espérance du monde; fournir (servir) à tous les ministères pour ces choses, faire idolâtrer le peuple, servir frauduleusement les idoles du monde entier, sous le nom de saints, et les reliques, et prendre part à leurs services; c'est ainsi que le peuple, s'égarant extrêmement de la voie de la vérité, croit servir Dieu et bien faire, (et par là) on excite ce peuple à la haine, à la colère et à la méchanceté contre les fidèles et contre les amis de la vérité, et il commet (fait) beaucoup d'homicides, et ainsi l'Apôtre dit la vérité : Tel est l'homme de péché accompli, et c'est lui qui s'élève au-dessus de tout ce qui est Dieu; et qui est servi, et qui s'oppose à toute vérité, et qui est assise dans le temple de Dieu, c'est-à-dire dans l'Église, se montrant de même que s'il était Dieu, et qui vient avec toute sorte de séductions pour ceux qui périssent. Et si ce rebelle est déjà venu en toute perfection, il ne faut plus le chercher. En effet, par la permission de Dieu, il est formé et déjà vieux, puisqu'il décroît déjà. Car sa puissance et son autorité sont diminuées, et le Seigneur Jésus a tué ce rebelle par le souffle de sa bouche et par beaucoup d'hommes de bonne volonté, et il fait intervenir une puissance qui lui est contraire aussi bien qu'à ses amis, qui disperse (dissipe) ses lieux et ses possessions, et qui met la division (partage) dans cette cité de Babylone d'où (en laquelle) toutes les générations tirent leur vigueur de malice.

QUELLES SONT LES OEUVRES DE L'ANTICHRIST?
La première œuvre de l'Antichrist c'est de bannir la vérité et de la changer en mensonge, en erreur et en hérésie.
La seconde oeuvre de l'Antichrist c'est de cacher le mensonge sous la vérité et sous les erreurs, et de le prouver et l'affermir (le confirmer) par la foi et par des miracles (vertus), d'entremêler la fausseté avec les choses spirituelles aux yeux du peuple soumis, soit à l'aide des ministres on des ministères, ou de toute l'Église.
Et ces deux oeuvres renferment une malice parfaite et accomplie, telle que (laquelle) ne purent exécuter (faire) aucun tyran ni aucun potentat jusqu'au temps de l'Antichrist.

Aussi, avant lui (5), Christ n'a jamais eu un tel ennemi qui pût ainsi (de même) pervertir la voie de la vérité en (celle de la) fausseté, et le mensonge en vérité, et (pervertir) semblablement les partisans de l'une et de l'autre de la vérité et du mensonge.

De manière que la sainte mère Église avec ses vrais enfants est toute foulée aux pieds en (ce qui concerne) les vérités, spécialement en (ce qui concerne) les ministères des vrais ministres selon la vérité, en (ce qui concerne) les ministères et la manière de s'en acquitter et de la part qu'y prennent ses enfants; elle pleure en se lamentant, répétant les paroles et les plaintes de Jérémie, disant :

En quelle manière est assise seule la cité du peuple païen et incirconcis? Elle est devenue veuve, c'est-à-dire de la vérité de son époux. Dame des nations, par leur soumission aux erreurs et aux péchés; princesse des provinces, par le partage du monde et des choses qui sont dans le monde, pleure et regarde (vois) plus en avant, et tu trouveras maintenant toutes choses accomplies par le temps.
Car la sainte Église, si elle existe, doit être regardée (tenue) pour une synagogue. Et la synagogue des méchants est prêchée comme la mère qui a bonne croyance en la loi. La fausseté est prêchée à la place de la vérité, l'iniquité à la place de l'équité, l'injustice est prêchée et est tenue pour la justice, l'erreur pour la foi, le péché pour la vertu, le mensonge pour la vérité.

QUELLES OEUVRES DÉCOULENT DES PREMIÈRES?
Celles-ci : La première oeuvre, c'est qu'il (l'Antichrist) a transporté le culte de latrie (NDE: les subtilités de distinction entre dulie et latrie ont sans doute été introduites postérieurement à la rédaction de ce traité en 1120), dû proprement à Dieu seul, à lui, à ses oeuvres, à la pauvre créature raisonnable et non raisonnable, sensible et non sensible : raisonnable comme les hommes saints ou saintes, transportés hors de ce monde, et leurs images, ossements et reliques.
Ses faits (de l'Antichrist) sont les sacrements, spécialement le sacrement de l'eucharistie qu'il adore comme Dieu et comme Jésus-Christ semblablement; il sert les choses bénites et consacrées, et défend d'adorer Dieu seul.
La seconde œuvre de l'Antichrist est qu'il ôte et enlève à Christ le mérite de Christ avec toute la suffisance de la grâce, de la justice, de la régénération, rémission des péchés, de la sanctification, de la confirmation et de la nourriture spirituelle; et il l'impute (ce mérite) et l'attribue à son autorité, à ses oeuvres, et aux saints, et à leur intercession et au feu du purgatoire; et il détourne (sépare) le peuple de Christ et l'amène vers les choses qu'on vient de dire, afin qu'il ne recherche pas celles de Christ ni par Christ (par sa médiation), mais (qu'il les cherche) seulement dans les oeuvres de ses mains, et non par une foi vivante en Dieu, ni en Jésus-Christ, ni au Saint-Esprit, mais selon la volonté et les œuvres de l'Antichrist, ainsi qu'il publie (prêche) que tout le salut consiste dans ses œuvres.
La troisième oeuvre de l'Antichrist, c'est qu'il attribue la régénération que donne le Saint-Esprit à la foi morte et extérieure, et baptise les enfants en cette foi, enseignant que c'est par elle que sont consacrés le baptême et la régénération; c'est dans la même foi (6) qu'il confère et donne les ordres et les autres sacrements, et c'est en elle (en cette foi) qu'il fonde tout le christianisme; ce qui est contre le Saint-Esprit (contre la foi au Saint-Esprit).
La quatrième oeuvre de l'Antichrist est celle par laquelle il bâtit et édifie, en même temps, en la messe, toute la religion et la sainteté du peuple, en ayant fait un tissu unique (tout ensemble) de différentes cérémonies judaïques, païennes et chrétiennes. Et y (à la messe) conduisant, pour l'entendre, la congrégation et le peuple, il prive celui-ci de la manducation spirituelle et sacramentelle, et l'éloigne de la vraie religion et des commandements de Dieu, l'éloigne (l'ôte) aussi des œuvres de miséricorde par ses offertoires; et par cette messe il loge (place) le peuple dans une espérance vaine.
La cinquième œuvre de l'Antichrist, c'est qu'il fait toutes ses œuvres, afin qu'il soit vu et qu'il satisfasse (opère) son insatiable avarice, comme aussi, afin qu'il puisse mettre toutes choses en vente et ne fasse rien sans simonie (commerce des chses saintes).
La sixième œuvre de l'Antichrist, c'est qu'il donne lieu à des péchés manifestes, sans (qu'il intervienne de) sentence ecclésiastique, et qu'il n'excommunie pas les impénitents.
La septième œuvre de l'Antichrist, c'est qu'il ne dirige ni ne défend son unité par le Saint-Esprit, mais à l'aide de la puissance séculière, et qu'il l'appelle (prend) également à son secours pour les choses spirituelles.
La huitième œuvre de l'Antichrist est qu'il hait, persécute, accuse, pille et met à mort les membres de Christ.
Ce sont presque là les principales œuvres qu'il fait (des œuvres de lui). Il les fait contre la vérité, et personne ne peut les compter toutes ni les écrire. Mais qu'il suffise pour le présent d'avoir montré comme au doigt (deita) ces choses comme (presque) les plus générales par lesquelles est couverte cette iniquité (l'Antichrist).

CHOSES PAR LESQUELLES EST COUVERTE L'INIQUITÉ DE L'ANTICHRIST
(Cette iniquité est couverte), premièrement et principalement, par une profession extérieure de la foi. À l'égard de quoi, l'Apôtre dit: Car ils confessent en paroles qu'ils ont connu Dieu, mais ils le renient par leurs actions.
(Elle est couverte), en second lieu, par la longue durée du temps, (par l'appui) des sages, des religieux, hommes et filles vierges, des veuves et des femmes honnêtes et d'un peuple peu nombreux, duquel il est dit dans l'Apocalypse: Et pouvoir lui fut donné (à la bête) en toute tribu et langue, et nations, et tous ceux qui habitent la terre l'adoreront.
(Elle est couverte) troisièmement, par l'autorité spirituelle des apôtres, contre lesquels l'Apôtre dit: Nous ne pouvons rien contre la vérité, et pouvoir ne nous est point donné pour la destruction.
(Elle est couverte), en quatrième lieu, par beaucoup de miracles faits ça et là, sur quoi l'Apôtre parle ainsi: Son avènement est selon l'oeuvre de Satan, accompagné de toute sorte de miracle (vertus), de signes et de merveilles mensongères et de toutes les tromperies de l'iniquité.
(Elle est couverte), en cinquième lieu, par sainteté extérieure, par prières, par jeûnes, par vigiles et aumônes; contre quoi l'Apôtre dit: Ayant l'apparence de la piété, mais renonçant à sa force (déniant sa force).
(Elle est couverte), sixièmement, par quelques paroles de Christ et par les écrits des anciens et par les conciles, lesquels ils suivent (gardent), en tant qu'ils ne condamnent (détruisent) par leur mauvaise vie et leurs voluptés.
(Elle est couverte) en septième lieu, par l'administration des sacrements, par lesquels ils vomissent généralement toutes les erreurs.
(Elle est couverte), huitièmement, par des remontrances et des prédications verbales contre les vices. car ils disent et ne font pas.
En neuvième lieu, d'entre ces (prédicateurs) les uns agissent (font) avec dissimulation (feinte), les autres avec vérité, et surtout en menant une vie vertueuse. Car ces élus de Dieu, ayant bonne volonté et une bonne conduite, retenus là comme dans Babylone, sont comme de l'or avec lequel le rebelle Antichrist couvre sa vanité, ne permettant pas, ni qu'on rende son vrai culte à Dieu seul, ni qu'on mette son espérance en Jésus-Christ seul, ni qu'on s'attache (tende) à la vraie religion.
Ces choses et beaucoup d'autres servent comme de manteau et de vêtement à l'Antichrist, au moyen desquelles il couvre sa malice mensongère, afin de n'être pas réprouvé entièrement comme païen, et à l'ombre desquelles il peut marcher mal honnêtement comme une prostituée.

DEVOIR DE SEPARATION DU CHRETIEN
Que le chrétien soit tenu par commandement de se séparer de l'Antichrist, cela est dit et prouvé par l'Ancien et par le Nouveau Testament:

car le Seigneur dit, Esaïe cinquante-deux : Éloignez-vous, éloignez-vous; sortez d'ici, gardez-vous de toucher à la souillure ; sortez du milieu d'elle; vous qui portez les vaisseaux (sacrés) du Seigneur, soyez purifiés. Car vous ne sortirez pas au milieu du tumulte, ni ne vous préparerez point à la fuite, etc.
Et Jérémie cinquante : Fuyez du milieu de Babylone, sortez de la terre des Chaldéens, et soyez comme des boucs à la tête du troupeau. Et voyez (voici), j'amènerai une grande assemblée de nations de la terre d'Aquilon a Babylone, et elles seront disposées (préparées) contre elle, et ensuite elle sera prise.
Nombres, XVI : Séparez-vous du milieu de l'assemblée, afin que je détruise et perde ceux-ci à la fois. Et de rechef (ensuite) : Éloignez-vous du tabernacle (de la tente) de ces rebelles, et gardez-vous de toucher aux choses qui leur appartiennent, afin que vous ne soyez pas enveloppés dans leurs pêchés.
Lévitique : Je suis votre Seigneur Dieu, qui vous a séparés des autres peuples. C'est pourquoi vous séparerez aussi l'animal pur de l'impur, et l'oiseau pur du non pur, et vous ne souillerez pas vos âmes à l'égard des bêtes, à l'égard des oiseaux et à l'égard de toutes les choses. qui ont mouvement sur la terre, et que je vous ai montrées comme souillées.
Item, Exode, XXXIV: Prends garde que tu fasses jamais amitié avec les habitants de cette ville, pour qu'elle t'entraîne dans la ruine.
Et ensuite: Ne fais aucun traité avec les hommes de cette contrée, de peur que lorsqu'ils auront paillardé avec leurs dieux et qu'ils auront adoré leurs images, quelqu'un t'invite et que tu ne manges des choses consacrées à ces dieux. Tu ne prendras pas non plus des femmes d'entre leurs filles pour tes fils, de peur qu'après qu'elles auront paillardé, c'est-à-dire idolâtré, elles ne fassent paillarder (prostituer) tes fils après leurs dieux.
Lévitique, XV, 31 : Vous instruirez donc vos enfants leur disant, qu'ils évitent les impuretés, afin qu'ils ne meurent pas dans leurs souillures dont ils auront souillé mon tabernacle.
Ezéchiel, XI, 21 : Mais, quant à ceux dont (7) le cœur marche par outrage et par offenses, je placerai leur voie (conduite) sur leur tête, dit le Seigneur.
Deutéronome, XX : Quand tu seras entré en la terre (le pays) que le Seigneur ton Dieu te donnera, garde-toi que tu ne veuilles imiter les abominations de ces peuples (de ces gens); car le Seigneur a toutes ces choses en abomination. Et, à cause des péchés de cette nature, il les effacera (détruira entièrement) à ton entrée. Tu seras parfait et sans, tache envers ton Dieu. Ces nations desquelles tu posséderas ces terres écoutent les augures et les devins ; mais tu as reçu d'autres ordres de ton Dieu.
D'après le Nouveau Testament aussi, il est manifeste, Jean, XII : Que le Seigneur est venu et a souffert la passion, afin qu'il réunit en un les enfants de Dieu.
Car c'est pour ces vérités d'unité et de séparation les uns d'avec les autres, qu'il dit, Matth., X : Car je suis tenu séparer (diviser) l'homme contre son père, la fille contre sa mère, la belle-fille contre la belle-mère, et les serviteurs de l'homme sont ses ennemis. Et il a commandé de se séparer, quand il a dit : Si quelqu'un n'est pas prêt à quitter (ne laissera) son père et sa mère, etc.
De même - Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous en habits de brebis, etc.
De même aussi : Gardez-vous du levain des pharisiens.
De même encore : Prenez garde que quelqu'un ne vous séduise (trompe); car plusieurs viendront en mon nom et séduiront plusieurs. Ainsi donc, si quelqu'un vous dit (dira) : Venez, Christ est ici, ou (il est) là; ne le croyez pas (veuillez ne pas le croire); gardez-vous d'aller après eux.
Et, dans l'Apocalypse, il admoneste de sa propre voix et commande à son peuple de sortir de Babylone, disant : Et j'ouïs une voix du ciel, me disant : O mon peuple, sors du milieu d'elle, et ne sois pas participant de ses péchés, afin que tu ne reçoives pas de ses plaies. Car ses péchés sont parvenus jusqu'au ciel, et le Seigneur n'oublie pas (se souvient de) ses iniquités.
L'Apôtre dit ceci même : Gardez-vous (ne veuillez) tirer le même joug avec les non fidèles. Car quelle participation y a-t-il (est) de la justice avec l'iniquité, ou quelle association entre la lumière et les ténèbres; car quel accord (y a-t-il) entre Christ et le diable, ou quelle est la part des fidèles avec les infidèles, ou quel rapport entre le temple de Dieu et les idoles? C'est pourquoi (pour laquelle cause), sortez du milieu d'eux et soyez séparés, dit le Seigneur; ne touchez pas ce qui n'est pas pur, et je vous cacherai, et je vous comme père, et vous me serez comme enfants fils et filles), dit le Seigneur tout-puissant.
Item, Ephés. V : Ne soyez pas faits participants avec eux; car vous étiez dans la voie (route) des ténèbres, mais maintenant vous êtes lumière au Seigneur.
Item, 1 Cor., X : Je ne veux pas que vous deveniez compagnons du démon. Vous ne pouvez pas être faits participants de la table du Seigneur et de la table des démons.
Item, 2 Thess., III - O frères, nous vous annonçons, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, que vous vous gardiez de tout frère qui marche déshonnêtement, et non selon les coutumes (enseignements) que vous avez reçues de nous. Car vous-mêmes savez en quelle manière il convient que vous nous imitiez (ressembliez).
Et ensuite : Si quelqu'un n'obéit pas à notre parole, notez-le par lettre et ne vous mêlez pas avec lui afin qu'il soit confus (confondu).
Item, Ephés., V : Gardez-vous de vous associer aux œuvres infructueuses des ténèbres.
De même, 2 Tim., III: Mais sache ceci, que des temps funestes (dangereux) viendront aux derniers ans.
Et plus bas: Ayant l'apparence de la piété, mais renonçant (déniant) à sa force, évite de telles gens.
Des choses sus-notées sont manifestement démontrées la malice de l'Antichrist et sa perversité, etc. Et comme il est ordonné (commandé) par le Seigneur de se séparer de lui intérieurement comme extérieurement, et de s'unir à Jérusalem la sainte cité. Ainsi donc, connaissant ces choses que le Seigneur nous révèle par ses serviteurs, et croyant à cette révélation, selon les saintes Écritures, et étant en même temps engagés (admonestés) par les commandements du Seigneur, nous nous séparons intérieurement et extérieurement de celui que nous croyons l'Antichrist, et nous avons formé (uni) des compagnies et une unité, avec bonne volonté et une intention droite, ayant pour fondement, pur et simple, de plaire au Seigneur et d'être sauvés, avec l'aide du Seigneur, autant que la vérité de Christ et de son Épouse, comme aussi notre faible intelligence, peuvent le permettre (soutenir).

Nous faisons (ordonnons) donc remarquer (noter) quelles sont les causes de notre séparation, comme aussi de notre congrégation, afin que si le Seigneur (nous) a donné d'avoir cette même vérité, elle porte elle-même l'amour, en même temps qu'en nous, et afin que si elle n'était peut-être pas bien éclairée, elle reçoive aide par ce ministère béni (arrosé) du Seigneur. Et s'il arrive qu'il ait été plus accordé à quelqu'un, et plus abondamment, nous désirons humblement d'en être instruits, de savoir mieux de lui et d'être corrigés en ce qui nous manque (en nos défauts).

Les raisons qui suivent sont donc la cause de notre séparation.

Qu'il soit connu (manifeste) à tous et à chacun, que la cause de notre séparation a été telle; savoir, la vérité essentielle et ministérielle de la foi, et la connaissance intime d'un vrai Dieu en trois personnes, dans une unité d'essence, (connaissance) que ne donne ni la chair ni le sang; le culte convenable dû à Dieu seul, l'amour qui lui appartient au-dessus de toutes choses, la glorification (sanctification) et l'honneur qui lui est dû aussi au-dessus de toutes choses et de tout ce qui se nomme; l'espérance vive qui est par Christ en Dieu; la régénération et le renouvellement intérieur par la foi, par l'espérance et par la charité; le mérite de Christ en toute suffisance de grâce et de justice ; la participation ou la communion de tous les élus; la rémission des péchés, la sainteté de la vie (sainte conversation), et le fidèle accomplissement de tous les commandements par la foi en Jésus-Christ; la véritable repentance (pénitence), la persévérance jusqu'à la fin et la vie éternelle.

Les vérités qui regardent le ministère sont celles-ci : Que les ministres doivent avoir des assemblées (congrégations) extérieures avec le peuple qui leur est soumis, en lieu et temps convenable, le tenant dans la vérité par les soins du ministère; savoir dans la vérité mentionnée plus haut, l'y amenant, l'y affermissant et l'y entretenant dans (par) de fidèles et fréquentes assemblées; les bons ministres étant, quant à la foi et à, la conduite, en exemple d'obéissance, et produisant avec Vigilance sur le troupeau la pratique et l'usage (l'exemple) du Seigneur.

Les choses auxquelles sont tenus les ministres pour servir le peuple sont celles-ci : Lui présenter la parole évangélique et la parole de la réconciliation, ou la loi de grâce, selon le dessein et l'intention de Christ. Car, il (le ministre) doit annoncer la parole évangélique, et le sacrement étant joint à la parole, confirme son sentiment et son intelligence, et affermit l'espérance en Christ chez le fidèle (ou, et chez le fidèle). La communion administrée par le ministre renferme (a) tout par (le moyen de) la vérité essentielle. Et s'il y a quelques autres choses qui concernent le ministère, elles peuvent toutes être comprises dans ce qui a été dit.

Or, de ces vérités particulières, les unes sont essentiellement nécessaires au salut des humains, les autres le sont conditionnellement. Elles sont contenues en douze articles, selon l'ajustement ou l'adjonction de plusieurs paroles des apôtres (8). Mais (cependant) a déjà été régnant par le passé, en l'Église, par un effet de la permission divine, etc.

1 - SIX INIQUITÉS DE L'ANTICHRIST
Les erreurs et les infidélités (impuretés) prédites par le Seigneur, touchant l'Antichrist, sont les suivantes : savoir, un service idolâtre varie et innombrable, accordé contre le commandement de Dieu et de Christ, non ait Créateur, mais à la créature visible et non visible, corporelle ou spirituelle, intelligente et sensible, produite naturellement, ou par un art quelconque, ou sous quelque nom que ce soit, comme de Christ et des saints ou des saintes, et, des reliques, et des personnes en autorité, auxquelles créatures est rendu un service accompagné de foi, d'espérance, d'actions, d'oraisons, de pèlerinages, d'aumônes, d'offrandes, de sacrifices fort dispendieux. Ils (les membres de l'Antichrist) servent une telle (sorte de) créatures, ils l'adorent, l'honorent de plusieurs manières, par des chants, par des panégyriques, par des solennités, par des célébrations de messes, par des vêpres, par des complies à ces mêmes créatures, par des heures, par des vigiles, par des fêtes, par acquisition de grâce, acquisition qui est essentiellement en Dieu seul, et méritoirement en Jésus-Christ, et qui s'obtient par la seule foi par le secours du Saint-Esprit.
Car il n'y a pas d'autre cause (ou source) de l'idolâtrie qu'une opinion fausse touchant la grâce, touchant la vérité, touchant l'autorité, l'invocation, l'intercession, lesquelles le même Antichrist ôte à Dieu (éloigne de) pour les attribuer aux ministères et aux oeuvres de ses mains, aux saints et au purgatoire. Et cette iniquité de l'Antichrist est directement contraire au premier commandement de la loi.

Semblablement, l'amour désordonné de l'Antichrist pour le monde est (la source) d'où procèdent (germent) dans l'Église tous les maux et les péchés des conducteurs, des directeurs, des supérieurs (officiers); péchés qui restent sans répression (correction), et qui sont contraires aux vérités de la foi et à la connaissance de Dieu le Père, selon le témoignage de Jean, qui dit : Celui qui pêche ne connaît point Dieu ni ne l'a vu. Car si quelqu'un aime le monde, la charité du Père n'est point en lui.


2 - La seconde iniquité de l'Antichrist, consiste (est) en ce qu'il place l'espérance de pardon, de grâce, de justice, de vérité et de vie éternelle, non en Christ, ni en Dieu par Christ, mais dans les hommes vivants et morts, dans l'autorité, dans des cérémonies (ministères) ecclésiastiques, dans des bénédictions, dans des sacrifices, dans des prières et, dans d'autres choses semblables indiquées plus haut, et non dans une foi véritable qui produit (opère) la repentance, avec la charité, l'éloignement du mal et l'avancement dans le bien.
Ce n'est pas dans une telle foi (9), que l'Antichrist enseigne a espérer fermement, et principalement la régénération, l'affermissement, la réfection spirituelle ou communion, la rémission des péchés, la sanctification en vie éternelle : mais par les sacrements et par sa perverse simonie, moyen par lequel le peuple est trompé (moqué), et ayant toutes choses vendables, il a imaginé des ordonnances anciennes et nouvelles pour obtenir de l'argent, permettant que si quelqu'un a dit ou fait ceci ou autre chose, il veut qu'il puisse acquérir et grâce et vie. Et cette double iniquité est, proprement appelée, dans les saintes Écritures, un adultère (paillardise) et une fornication. C'est pourquoi, de tels ministres, qui conduisent (conduisant) le peuple grossier dans de telles erreurs, sont appelés paillarde (prostituée) apocalyptique. Cette iniquité est contraire an second article, et de rechef, contraire au second et au troisième commandement de la loi.


3 - La troisième iniquité de l'Antichrist, c'est, qu'outre ce qui a été dit, il a inventé (trouvé) de fausses religions, des règles, des monastères en forme d'église, comme moyens d'acquérir l'espérance. De même, ils (les siens) affirment, contre toute vérité, que c'est un devoir pour chacun d'entendre souvent et dévotement les messes, de recevoir les sacrements, de se confesser (mais rarement avec contrition), de faire des satisfactions par des jeûnes ou en vidant sa bourse, être resté ou d'être membre de l'Église romaine, de s'adonner ou livrer à la règle ou au capuchon. Et cette iniquité de l'Antichrist est directement contraire au huitième article du symbole : Je crois au Saint-Esprit.

4 - La quatrième iniquité de l'Antichrist, c'est, qu'étant bien lui-même la quatrième bête décrite jadis (devant) par Daniel, et la paillarde (prostituée) apocalyptique, il s'attribue (s'orne) des noms, l'autorité, le pouvoir, les dignités, les ministères, les offices, les écritures, au point de s'égaler et de se comparer à la vraie et sainte mère Église, en laquelle se trouve ministériellement, et non autrement, le salut et la vérité, quant à la vie, à la doctrine et aux sacrements. Car, si ce n'était qu'elle (l'Église romaine) se couvre ainsi elle-même et ses ministres d'erreur et pécheurs manifestes, elle serait abandonnée de tous si elle était connue.
Mais parce que les empereurs et les rois, et les princes, estimant qu'elle était semblable à la vraie sainte mère Église, ils l'aimèrent elle-même et la dotèrent contre le commandement de Dieu. Cette iniquité des ministres, des sujets, de ceux ordonnés dans l'erreur et dans le péché, est directement contre le neuvième article : Je crois la sainte Église. Ces (choses) appartiennent à la première partie de l'article.

En second lieu, en effet, eux (ces ministres, etc.), en participant aux seules formes extérieures, selon les usages humainement, ordonnés et inventés, croient on espèrent avoir leur part à la réalité (vérité) des offices de pasteurs et de la cure d'âmes, comme si ceux qui seraient tondus comme des agneaux, qui seraient oints à la manière d'une paroi, et qui recevraient la bénédiction en touchant le livre et le calice, pouvaient prétendre (confesser) être convenablement (droitement) ordonnés prêtres.

Il en est semblablement (comme il a déjà été dit) du peuple assujetti, si, parce qu'il a sa part (Communique) aux paroles, aux signes, aux exercices extérieurs (de dehors) et à leurs diverses cérémonies (faits) souvent répétées, il se persuadait (pensait) avoir part à la vérité qui en est couverte (tirée). Et cela est contraire à l'autre partie du huitième article : Je crois la communion des saints.

Une chose est à faire, c'est qu'il faut s'éloigner (10) (sortir) de la très-mauvaise communion des moines qui, pour amener à sa participation les hommes charnels, leur font espérer, au moyen de choses de néant et par avarice, qu'ils leur feront avoir part à leur pauvreté et à leur chasteté, quels qu'ils soient d'ailleurs, ou luxurieux ou avares, pourvu qu'ils leur fassent à eux-mêmes des dons.


5- La cinquième iniquité de l'Antichrist consiste (est) en ce qu'il promet, en trompant, le pardon et la rémission des péchés à des pécheurs non véritablement contrits et qui n'ont pas renoncé fermement aux mauvaises œuvres. Et il fait d'abord cette promesse de la rémission des péchés au moyen de la confession auriculaire et de l'absolution donnée par des hommes, au moyen des pèlerinages dictés par l'avarice.
Cette iniquité est contraire au onzième article du Credo : Je crois la rémission des péchés. Car cette rémission dépend de l'autorité de Dieu et du ministère de Jésus-Christ, puis en partie (11) de la foi, de l'espérance, de la repentance, de la charité et de l'obéissance qui, selon la Parole de Dieu, est en l'homme.


6 - Il y a encore une sixième iniquité (des membres de l'Antichrist), c'est qu'ils prolongent l'espérance (de pardon) jusqu'à la fin de la vie, au moyen des iniquités cachées (couvertes) déjà mentionnées pour les pécheurs manifestes, et spécialement au moyen de l'extrême-onction et du purgatoire rêvé, en sorte que les hommes grossiers, qui ne connaissent pas la vérité, persévèrent dans l'erreur et sont (déclarés) absous de péchés dont ils ne se sont jamais éloignés de libre volonté pour qu'ils pussent en espérer la rémission à venir et la vie éternelle.
Cette iniquité est directement contraire aux onzième et douzième articles de la foi.

lundi 18 mai 2009

LE DELOMELANICON


Invention, réalité ? Dans tous les cas, l'histoire de cet ouvrage fait rêver, il aurait été écrit par Lucifer en personne, il est orné de 9 gravures, qui, après quelques incantations, servent à invoquer le Prince des Ténèbres, petit problème, il ne nous reste que les gravures, le texte initial a disparu.


On dit également que le Delomelanicon a déjà été mentionné, entre autre, par le prophète Daniel, Hippocrates, Flavius Josephus, Albertus Magnus, et Leon III.

La première mention directe se retrouve dans le papyrus de Turis, écrit il y a 3300 ans. Il est cité plusieurs fois dans le "corpus Hermeticum", dans "l'Asclemandres", et une copie se trouvait apparemment dans la bibliothèque d'Alexandrie.
Il semblerait que le roi Salomon en possédait également une copie qui aurait été brûlé en 1350 par ordre personnel de pape Innocent VI qui a simplement déclaré, "Ce livre contient une méthode pour appeler des diables."

Arturo Pérez-Reverte nous en parle dans son livre "Club Dumas", ouvrage qui est la source d'inspiration au film "La Neuvième Porte", de Roman Polanski toujours très curieux de démonologie.

Personnellement, je veux y croire.

Sic Luceat Lux
Elisandre







lundi 27 avril 2009

AUSTIN OSMAN SPARE


Austin Osman Spare

Austin Osman Spare était le fils d'un policier de Londres. Enfant, il montra une grande affinité pour l'art et il participa brièvement aux cours donnés par la Lambeth Art School. À l'âge de 13 ans, il quitta l'école afin de devenir l'apprenti d'un artisan vitrier, Powell. Durant ses jeunes années, sa fascination pour l'occulte grandit influençant fortement ses propres œuvres. En mai 1904, un de ses dessins fut exhibé à l'exposition annuelle de la Royal Academy de Londres.
En 1905, il publie son premier livre, Earth Inferno. Celui-ci devait, au départ, être un recueil de dessins, mais il comprenait également des commentaires dévoilant certaines de ses conceptions et inclinaisons spirituelles.

The Vampire are coming

En octobre 1907, Spare exposa ses dessins à la Bruton Gallery de Londres. Les critiques rapprochèrent ses œuvres de celles de Aubrey Beardsley, mais les images de Spare étaient pleines de visages humains grotesques et sexuels et de symboles magiques. Ces éléments attirèrent les regards des éléments de l'avant-garde londonienne ainsi que d'Aleister Crowley. Il fut initié en tant que Probationer de l'ordre de Crowley, l'Astrum Argentum (« Étoile d'Argent ») en juillet 1909, mais il ne sera jamais initié en tant que membre à part entière bien qu'il contribua par ses œuvres aux publications de Crowley, et plus particulièrement à The Equinox, la revue magique de Crowley.
Son nom magique était Yihoveaum. Plus tard, Crowley surnommera Spare un « Frère Noir » signifiant ainsi qu'il désapprouvait l'œuvre de Spare.

En 1909, Austin Spare commence à la rédaction de The Book of Pleasure (Le Livre des Plaisirs ), ce n'est qu'en 1913 que celui-ci fut publié.

Cet ouvrage est considéré comme son oeuvre magique la plus importante, il comprend des instructions détaillées concernant les sigils, ainsi que sa posture de la mort.


Inferno
Son iconoclasme, destiné à la propagande et au symbolisme de la magie cérémonielle, et son aversion du moralisme ainsi que son utilisation des Sceaux distinguèrent son style personnel de la magie que son ami Kenneth Grant appela Zos Kia Cultus.
Spare dira plus tard qu'il apprit beaucoup d'une certaine Madame Paterson, une descendante d'une sorcière de Salem. Son œuvre The Focus of Life comprend un dessin au crayon de cette dernière.

En 1917, durant la Première Guerre mondiale, Spare fut incorporé dans l'armée britannique, servant en tant que médecin au sein du Royal Army Medical Corps dans les hôpitaux de Londres.
Bien qu'il fut considéré comme un artiste de grand talent, Spare vécut en reclus et oublié à partir de la moitié des années 20.
Spare fut l'un des créateur, si ce n'est le créateur, de l'art magique des sigils (ou sceaux). Il mit au point une technique basée sur l'intention magique et la création d'un sceau dans lequel l'intention est projetée par la volonté du magicien afin de produire des effets dans le monde réel.


« Les moyens utilisés & la manière dont cela se déroule sont simples, l’inverse de la science. J’utilise une formule, créée par l’instinct & fabriquée arbitrairement, qui n’est pas rendue complexe par des hypothèses & des expérimentations. La loi de la sorcellerie est sa propre loi, utilisant les symboles sympathiques » Austin Osman Spare.


lundi 6 avril 2009

CRAZY KEIKO COMEDIENNE et POETESSE

Notre rencontre fut spontanée, nos discussions amusantes et graves, nous laissant chaque fois, un goût de bon vin et le souvenir d'un agréable repas, car gourmandes, nous le sommes. Un petit clin d'oeil à une amie comédienne, poétesse et philosophe et surtout militante de la Vérité. Voici quelques poèmes de son recueil "Tournesol Pleureur".


Extase d'un instant


Ô liqueur perverse ! Ton amitié traîtresse
A terni ma vie. Ô extase d’un instant !
Mes obsessions tu berces tant aimée maîtresse
L’espace d’un moment. Illusion pourtant.

Ta robe de passion habille mes pulsions
Tourbillon frénétique, évasion de l’âme.
Extase d’un instant ! Cruelle dévotion !
Dionysos mon Seigneur dans tes bras je me pâme.

Bordeaux Brouilly Bourgogne ou Bourgueil que m’importe ?
Ivre de Ton sang, mon Christ, ivre de Ton sang
Je pénètre l’Enfer et en ouvre les portes.

La pudeur se dérobe, envolées sont les peurs.
Mon Dieu ! Tout devient si simple à réaliser
Et tout est excitant, l’espace d’un instant.

Sourire Sorcier

Son sourire souffrait l’effroi de son histoire
Cent mille mystères semblaient l’assassiner
De ses pensées froissées il était le miroir
Sans permettre malgré de les déshabiller.

Son allure, elle-même ne pouvait y croire
Son image de reine cachait trop de secrets
Elle était fière et belle dans sa tour d’ivoire
Jamais on n’a osé trop près s’en approcher.

Ce sourire, une armure, un vrai masque illusoire
Une belle parure suggérant l’idée
Qu’elle avait surmonté de multiples déboires.

Si fière et courageuse elle dissimulait
Son mal-être et ses peurs et son « je broie du noir »
Grâce à ce soleil mort sur ses lèvres posé




Les Petites Gens

Ah ! Les petites gens qui nous parlent du temps !
Ils se plaisent à boire et s'amusent d'un rien.
Ils nous parlent de bouffe, ils nous parlent d'avant
Ils ne sont pas savants mais on les aime bien.

La connaissance engendre des inconvénients
Que l'ignorance exclut car elle nous prévient
De tout conflit d'idées de tout désagrément.
Mieux vaut être abruti au moins le moral tient !

Je préfère me taire accordant au mystère
La juste prétention de la réflexion.
Je ne puis vous charmer pardonnez-moi mes frères !

Je n'ai pas de passion dans les simples actions.
Riez ! Car au final ma vie est bien amère.
Ce n'est qu'avec Raison que j'ai quelque émotion.



Un Eden pour mes larmes

De ton socle anomique ô puissant Eros vois
Ce que ton cœur ludique inspire aux jeux du charme !
De tout désir pudique excite donc la foi
Ce dont mon cœur se pique a besoin de tes armes…
De tes déprédations accepte mes émois :
Mon idiosyncrasie accuse tes alarmes.
Ta procrastination accentue les effrois
Dont ma brusque empathie s’accable du vacarme.
Par ton regard lascif Proserpine entre en moi
Attisant le feu vif d’un corps qui se désarme.
Encensée par ta flamme à en souffrir pour toi
Je serais courtisane aux alentours de Parme
Je serais enfin femme et tu serais mon roi :
Et ferais de ton âme un Eden pour mes larmes…



Keiko, c'est aussi la comédienne, le théâtre ou la mise en scène, il y a peu, elle a fait un tabac au théâtre Galabru à Paris, mais le mieux est que vous visitiez son site :
http://crazykeiko.fr/presentation.html
http://www.myspace.com/crazykeiko

dimanche 29 mars 2009

Le Bureau des Rêves Perdus




Le diabolique trio niçois, les mousquetaires de l'occulte, présentent "Le Bureau des Rêves Perdus", hymne au roman populaire.


"Petit ou grand nous sommes convaincus qu’il cache des trésors de livres dont nous ne lirons jamais la moindre ligne. Et pourtant, ces livres ont été publiés un jour, il y a une décennie, un siècle, une éternité. Voilà bien le reflet de notre démarche et de la passion qui nous anime, nous les bibliophiles, les hystérico-obsessionels de l’édition originale, du numéro qui manque pour compléter notre collection. Ce livre est épuisé. Et oui, il en faut du temps pour retrouver ce livre oublié, perdu dans les méandres du temps, dont le faible tirage agrandit notre désarroi de ne jamais lire ce texte dont nous connaissons l’existence?! des kilomètres de rayonnages de bouquins, de manuscrits, d’illustrés, de journaux, revues, etc. chez les bouquinistes, vide-greniers, marchés aux livres…" Extrait de la préface de J.Dugast, directeur des Editions de l'Antre : http://leseditionsdelantre.free.fr



"A noter l'une des dernières interview de Francis Lacassin que nous avions faite lors d'un bon restaurant à Nice, la réédition d'un texte quasi-introuvable de Marc Agapit sous le nom d'Ange Arbos, des textes assez rares sur les étranges aventures de Claude Seignolle et un avant gout des aventures du détective milliardaire de Gustave Le Rouge Todd Marvel."(webmaster Heresie.com) : http://www.heresie.com

- Préface de J.Dugast
- 7 Pas dans l'Etrange en compagnie de Claude Seignolle avec un avant-propos d' Heresie.com
_ D'Ange Arbos à Marc Agapit dans l'Angoisse par Patryck Ficini, chroniqueur de Sueurs Froides : http://www.sinart.asso.fr- La Maison du Robot par Ange Arbos
- Gaston Lerouge avec un avant-propos de J.Dugast
_ Deux nouvelles de Todd Marvel, le Détective milliardaire.
- Interview de Francis Lacassin ou le dernier passeur de livres, avec un hommage d'Heresie.com

Nombreuses illustrations.

Prix : 9 euros hors frais postaux - Contactez Heresie.com : http://www.heresie.com ou les Editions de l'Antre : http://leseditionsdelantre.free.fr

jeudi 26 mars 2009

ABSINTHE-CONFERENCE APACHE

Le culte de l'absinthe....une série de cartes publiées dans les années 1900.





mardi 17 mars 2009

FEMME A BARBE/SAINTE WILGEFORTE



Curieuse de tout ce qui touche aux religions, j'ai découvert en martyrologie, une femme à barbe, et oui...par contre, plusieurs légendes courent sur cette martyre.

Il faut aussi remarquer que cette sainte est représentée crucifiée, ce qui est assez rare dans l'iconographie chrétienne, Félicien Rops n'était toujours pas né.


Nous sommes au XIème siècle, Wilgeforte est la fille d'un roi de Portugal, à l'apogée de sa beauté et convoitée de tous, elle décide pourtant de se consacrer à Dieu.

Entretemps, Amare, roi de Sicile envahit le Portugal, un jour, il aperçoit Wilgeforte, amoureux fou, il la demande en mariage, le roi opportuniste accepte immédiatement , c'est alors, que pour échapper à la convoitise des hommes et de son prétendant, qu'elle supplie Dieu de l'aider à faire fuir tout soupirant, le miracle alors s'accomplit, une énorme barbe pousse sur son visage.



Alors que nous pouvons imaginer que cette pauvre fille eut enfin la paix ; et bien non...son père, contrarié et dégoûté d'un tel prodige la fit rouer de coups et crucifier.

Comme si le sort ne s'était pas assez acharné sur sa pauvre personne, le clergé la remisa dans un coin aux alentours de 1827 et en parla le moins possible, à Beauvais, on décida de la raser !!!

Qui dira encore que le clergé était respectueux des femmes ? Même à barbe, elles restent dans l'ombre, pourtant peut-on encore parler de succomber à la tentation ?

C'est à l'église Saint-Etienne de Beauvais que l'on retrouve la trace d'un culte qui lui est voué le 20 juillet, voici une oraison en son honneur :
"Seigneur, nous vous en prions, jetez vos regards sur vos enfants qui vous implorent, par les mérites et les prières de la bienheureuse Wilgeforte, vierge et martyre, fille de roi; et de même que vous avez exaucé ses prières en la dotant d'une barbe, de même daignez accueillir les souhaits de nos cours, en nous accordant un supplément de votre divine grâce."

On peut aussi admirer une statue datant du XVème siècle de Sainte Wilgeforte à l'église de Wuissant dans le Pas-de-Calais.

ELIPHAS LEVI



"On dit que pour bien apprendre il faut oublier plusieurs fois." Eliphas Levi

ÉLIPHAS LÉVI ou Alphonse Louis Constant ( 1810 - 1875 ) était fils de savetier, né à Paris dans le quartier de l'Odéon

Eliphas Lévi fut d'abord écclésiastique avant de devenir une figure de l'occultisme.

La rencontre de plusieurs personnes a marqué sa vie tout en changeant son parcours ésotérique, tout d'abord Balzac qui l'immortalise dans "la recherche de l'absolu" sous le nom de Balthazar Claës.
En 1852, il fait la connaissance de Wronski, âgé de 74 ans, édifie son dogme et rituel de haute magie.
Suite à un exil en 1854, en Angleterre, il rencontre Bulwer Lytton, imperator de la societas Rosicruciana in Anglia, qui lui confère le baptême de la lumière.

Le Maître travaille beaucoup, initiant aux sciences occultes des érudits appartenant à la plus haute aristocratie, et même l'évêque d'Évreux, Mgr Devoucoux, à qui il donne de leçons de Qabbale. Grâce à l'argent perçu en rémunération de ses leçons, il vit dans un relatif confort matériel, enrichissant sans cesse sa bibliothèque. Avec le comte Alexandre Branicki, hermétiste, il réussit quelques expériences probantes du Grand Œuvre dans un laboratoire installé au château de Beauregard, à Villeneuve-Saint-Georges. Ce château appartenait à la veuve d'Honoré de Balzac et Eliphas devint bientôt l'ami du beau-fils de Madame de Balzac, le comte Georges Mniszech. Le château, saccagé par les Prussiens en 1870, est aujourd'hui la mairie de Villeneuve-Saint-Georges.

En mai 1861, il retourne à Londres, accompagné du comte Alexandre Branicki, passer quelques mois auprès de Bulwer-Lytton, arrivé cette année-là à la tête de la Rosicrucian Society of England. Au cours de ce deuxième séjour, Eliphas Lévi rend plusieurs fois visite à Eugène Vintras, qui lui avait envoyé deux de ses disciples pour l'inviter des années auparavant. Il le considère non pas comme un prophète, mais comme un médium singulier, un intéressant sujet d'études, et lui achète même son livre l'Évangile éternel.


En juillet 1861, le baron italien N-J Spedalieri avait acheté chez un libraire de Marseille le Dogme et rituel de la haute magie et décidait de prendre contact avec l'auteur. S'ensuivit une correspondance de plus de 1 000 lettres qui dura du 24 octobre 1861 au 14 février 1874. C'est un cours de Qabbale unique, précis, rempli de figures explicatives et d'anecdotes. Spedalieri fut l'un des plus importants mécènes du professeur de sciences occultes.

Rentré à Paris, Eliphas Lévi publie le Sorcier de Meudon, dédié à Mme de Balzac. Depuis son retour de Londres, il assiste régulièrement aux réunions maçonniques de la loge Rose du parfait silence. Le 21 août 1861, on lui confère le grade de Maître. À la suite d'un long discours sur les Mystères de l'initiation qu'il prononça le mois suivant, un Frère, le professeur Ganeval, ayant voulu présenter quelques observations sur ce qui venait d'être dit, se heurta aux protestations d'Eliphas, qui se retira et ne reparut plus en loge. Les tentatives de Caubet pour le faire revenir sur sa décision le lendemain furent infructueuses. La loge Rose du parfait silence sera mise en sommeil en 1885, mais n'y cherchons peut-être pas, comme Oswald Wirth, une relation de cause à effet.

Le 29 août 1862 paraît Fables et symboles, ouvrage dans lequel Eliphas Lévi analyse les symboles de Pythagore, des Évangiles apocryphes, du Talmud...etc. Quelques fois il fréquente incognito les réunions spirites pour se documenter. Pierre Christian, auteur de l'étrange roman l'Homme rouge des Tuileries, fut le voisin et l'ami d'Eliphas et profita de ses entretiens et de ses leçons toutes bénévoles. En 1863 meurt Louis Lucas, chimiste initié aux secrets d'Hermès, disciple de Wronski et ami d'Eliphas. Ses écrits contiennent la première synthèse scientifique qui allie Science occulte et sciences expérimentales. Il était l'inventeur d'un appareil capable de mesurer l'équilibre du magnétisme vital, qu'il appelait le biomètre. Cet appareil a trouvé depuis une bien curieuse utilisation : un appareil très similaire fait en effet partie de la panoplie des scientologues !

Le 15 mai 1864, Eliphas déménage dans un trois pièces au 2e étage du nº 155 rue de Sèvres, sa dernière demeure. En 1865 paraît la Science des esprits, recueil d'essais traitant à nouveau du symbolisme des Évangiles apocryphes, du Talmud, etc.(absolument rien à voir avec le spiritisme). À l'été 1865, l'éditeur Larousse lui demande d'écrire quelques articles de Qabbale pour son Grand Dictionnaire. Il travaille en même temps à un ouvrage superbe, mais d’une valeur historique contestable, le Livre des splendeurs, qui traite surtout de la Qabbale du Zohar et qui ne paraîtra qu’après sa mort. À cette époque il commence à ressentir souvent des douleurs névralgiques à la tête, qui le font beaucoup souffrir. Durant le siège de Paris en 1870, sa vie fut des plus pénibles car les communications avec la province étant coupées, il ne pouvait plus recevoir de subsides de la part de ses élèves. La dureté de son service comme Garde National révèle une maladie de cœur. Une fois la Commune terminée, le Maître totalement dénué de ressources une fois de plus, trouve chez une de ses élèves, Mme Mary Gebhard, qui habitait Elberfeld en Allemagne, une longue et chaude hospitalité. Les événements lui inspirent quelques pensées qu'il réunit sous le titre les Portes de l'avenir.

A son retour d'Allemagne, il apprend la mort de la baronne Spedalieri. La mort de sa femme affecte tellement le baron qu'il se croit devenu matérialiste et athée et finit par se détourner du Maître. En décembre 1871, Eliphas Lévi termine un autre manuscrit : le Grimoire franco-latomorum, consacré à l'explication des rites de la Franc-Maçonnerie. À l'automne 1872, son ex-femme, écrivain et sculpteur désormais reconnue, se marie avec le député de Marseille, Maurice Rouvier, qui deviendra ministre du commerce. Sa santé continue de se détériorer. À cause d'une maladie de cœur il est sujet à des évanouissements au cours desquels il dit avoir des visions extatiques. Pendant l'année 1873, il achève le manuscrit de l'Évangile de la science.

En novembre 1873, Judith Mendès, fille de Théophile Gautier, avait eu besoin pour un de ses romans orientaux, de renseignements sur la Kabbale chaldéenne. La renommée l'avait conduite tout droit chez Eliphas Lévi, qui invité un jour chez son père, avait prédit à la jeune fille ses succès de jeune femme en lisant dans sa main. Son mari Catulle Mendès présenta Eliphas à l'écrivain Victor Hugo, qui paraît-il connaissait les ouvrages du Qabbaliste et les avait même appréciés.

L'année 1874 fut très douloureuse à passer : une bronchite assez grave, des étouffements, et une fièvre persistante ne lui laissèrent presque aucun repos. Ses jambes s'enflèrent peu à peu et une sorte d'éléphantiasis se déclara bientôt. En janvier 1875, le Maître achève son dernier manuscrit : le Catéchisme de la paix. Le 31 mai 1875, il s'éteint au nº 155 rue de Sèvres, à l'âge de 65 ans. On l'inhuma au cimetière d'Ivry, une simple croix de bois marquant l'emplacement de sa tombe. En 1881, son corps fut exhumé et ses restes placés dans la fosse commune.





"O homme ! dis-moi ce que tu espères, et je te dirais ce que tu vaux."



Livre II, du Grand Arcane d’Eliphas Lévi : LE MAL.

Le mal dans ce qu’il a de réalité est l’affirmation du désordre. Or en présence de l’ordre éternel, le désordre est essentiellement transitoire. En présence de l’ordre absolu il est la volonté de Dieu, le désordre n’est que relatif. L’affirmation absolue du désordre et du mal est donc essentiellement le mensonge.

L’affirmation absolue du mal, c’est la négation de Dieu, puisque Dieu est la raison suprême et absolue du bien.

Le mal, dans l’ordre philosophique, c’est la négation de la raison.

Dans l’ordre social, c’est la négation du devoir.

Dans l’ordre physique, c’est la résistance aux lois inviolables de la nature.

La souffrance n’est pas un mal, c’est la conséquence et presque toujours le remède du mal.

Rien de ce qui est naturellement inévitable et ne saurait être un mal. L’hiver, la nuit et la mort ne sont pas des maux. Ce sont des transitions naturelles d’un jour à un autre jour, d’un automne à un printemps, d’une vie à une autre vie.

Proud’hon a dit : Dieu c’est le mal ; c’est comme s’il avait dit : Dieu c’est le diable, car le diable est pris généralement pour le génie du mal. Retournons la proposition, elle nous donnera cette formule paradoxale : Le diable c’est Dieu, ou en d’autres termes : Le mal c’est Dieu. Mais certes, en parlant ainsi, le roi des logiciens que nous citons ne voulait pas, sous le nom de Dieu, désigner la personnification hypothétique du bien. Il songeait au dieu absurde que font les hommes et, en expliquant ainsi sa pensée, nous dirons qu’il avait raison, car le diable c’est la caricature de Dieu et ce que nous appelons le mal, c’est le bien mal défini et mal compris.

On ne saurait aimer le mal pour le mal, le désordre pour le désordre. L’infraction des lois nous plaît parce qu’elle semble nous mettre au-dessus des lois. Les hommes ne sont pas faits pour la loi, mais la loi est faite pour les hommes, disait Jésus, parole audacieuse que les prêtres de ce temps-là durent trouver subversive et impie, parole dont l’orgueil humain peut prodigieusement abuser. L’on nous dit que Dieu n’a que des droits et point de devoirs parce qu’il est le plus fort, et c’est cela qui est une parole impie. Nous devons tout à Dieu, ose-t-on ajouter, et Dieu ne nous doit rien. C’est le contraire qui est vrai. Dieu, qui est infiniment plus grand que nous, contracte en nous mettant au monde une dette infinie. C’est lui qui a creusé le gouffre de la faiblesse humaine, ce doit être à lui de le combler.

La lâcheté absurde de la tyrannie dans le vieux monde nous a légué le fantôme d’un dieu absurde et lâche, ce dieu qui fait un miracle éternel pour forcer l’être fini à être infini en souffrances.

Supposons un instant que l’un de nous a pu créer une éphémère et qu’il lui a dit sans qu’elle puisse l’entendre : Ma créature, adore-moi ! La pauvre bestiole a voltigé sans penser à rien, elle est morte à la fin de sa journée et un nécromancien dit à l’homme qu’en versant sur elle une goutte de son sang il pourra ressusciter l’éphémère.

L’homme se pique - j’en ferais autant à sa place ; voilà l’éphémère ressuscitée. Que fera l’homme ? - ce qu’il fera, je vais vous le dire, s’écrie le fanatique croyant. Comme l’éphémère dans sa première vie n’a eut l’esprit ou la bêtise de l’adorer, il allumera un brasier épouvantable et y jettera l’éphémère en regrettant seulement de ne pouvoir pas lui conserver miraculeusement la vie au milieu des flammes afin quelle brûle éternellement.
Allons donc, dira tout le monde, il n’existe pas de fou furieux qui soit aussi lâche, aussi méchant que cela ! - Je vous demande pardon, chrétiens vulgaires, l’homme en question ne saurait exister, j’en conviens ; mais il existe, dans votre imagination seulement, hâtons-nous de le dire, quelqu’un de plus cruel et de plus lâche. C’est votre. Dieu , tel que vous l’expliquer cet c’est de celui-là que Proud’hon a eu mille fois raison de dire : Dieu c’est le mal.

En ce sens le mal serait l’affirmation mensongère d’un dieu mauvais c’est ce dieu-là qui serait le diable ou son compère . Une religion lui apporterait pour baume aux plaies de l’humanité un pareil dogme, les empoisonnerait au lieu de les guérir. Il en résulterait l’abrutissement des esprits et la dépravation des consciences ; et la propagande faite au nom d’un pareil Dieu pourrait s’appeler le magnétisme du mal. Le résultat du mensonge c’est l’injustice. De l’injustice résulte l’iniquité qui produit l’anarchie dans les états, et dans les individus, le dérèglement et la mort.

Un mensonge ne saurait exister s’il n’évoquait dans la lumière morte une sorte de vérité spectrale, et tous les menteurs de la vie se trompent eux-mêmes les premiers en prenant la nuit pour le jour. L’anarchiste se croit libre, le voleur se croit habile, le libertin croit qu’il s’amuse, le despote pense qu’opprimer c’est régner. Que faudrait-il pour détruire le mal sur la terre ? Une chose bien simple en apparence : détromper les sots et les méchants. Mais ici toute bonne volonté se brise et toute puissance échoue ; les méchants et les sots ne veulent pas être détrompés. Nous arrivons à cette perversité secrète qui semble être la racine du mal, le goût du désordre et l’attachement à l’erreur. Nous prétendons pour notre part que cette perversité, n’existe pas du moins comme librement consentie et voulue. Elle n’est autre chose que l’empoisonnement de la volonté par la force délétère de l’erreur.

L’air respirable se compose comme on sait d’hydrogène, d’oxygène et d’azote. L’oxygène et l’hydrogène correspondent à la lumière de vie et l’azote à la lumière morte. Un homme plongé clans l’azote ne saurait respirer ni vivre, de même un homme asphyxié par la lumière spectrale ne peut plus faire acte de volonté libre. Ce n’est point dans l’atmosphère que s’accomplit le grand phénomène de la lumière, c’est dans les yeux organisés pour la voir. Un jour, un philosophe de l’école positiviste, M. Littré, si je ne me trompe, disait que l’immensité n’est qu’une nuit infinie ponctuée çà et là de quelques étoiles.

Cela est vrai, lui répondit quelqu’un, pour nos yeux qui ne sont pas organisés pour la perception d’une autre clarté que la lumière du soleil. Mais l’idée même de cette lumière ne nous apparaît-elle pas en rêve tandis qu’il fait nuit sur la terre et que nos yeux sont fermés ? Quel est le jour des âmes ? Comment voit-on par la pensée ? La nuit de nos yeux existerait-elle pour des yeux autrement disposés ? Et si nos yeux n’existaient pas, aurions-nous conscience de la nuit ? Pour les aveugles il n’existe ni étoiles, ni soleil ; et si nous mettons un bandeau sur nos yeux nous devenons aveugles volontaires. La perversité des sens comme celle des facultés de l’âme résulte d’un accident ou d’un premier attentat aux lois de la nature ; elle devient alors nécessaire et comme fatale. Que faire pour les aveugles ? Les prendre par la main et, les conduire. Mais s’ils ne veulent pas se laisser conduire ? Il faut mettre des garde fous. Mais s’ils les renversent ? Alors ce ne sont plus seulement des aveugles, ce sont des aliénés dangereux et il faut bien les laisser périr si on ne peut pas les enfermer.

Edgar Allan Poë raconte la plaisante histoire d’une maison de fous où les malades avaient réussi à s’emparer des infirmiers et des gardiens et les avaient enfermés dans leurs propres cabanons après les avoir accoutrés en bêtes sauvages. Les voilà triomphants dans les appartements de leur médecin ; ils boivent le vin de l’établissement et se félicitent réciproquement d’avoir fait de très belles cures. Pendant qu’ils sont à table, les prisonniers brisent leurs chaînes et viennent les surprendre à grands coups de bâton. Ils sont devenus furieux contre les pauvres fous et les justifient en quelque sorte par des mauvais traitements insensés.

Voilà l’histoire des révolutions modernes. Les fous, triomphant par leur grand nombre, qui constitue ce qu’on nomme les majorités, emprisonnent les sages et les déguisent en bêtes fauves. Bientôt les prisons s’usent et se brisent, et les sages d’hier rendus fous par la souffrance s’échappent en hurlant et répandent la terreur. On voulait leur imposer un faux dieu, ils vocifèrent qu’il n’y a point de Dieu. Alors les indifférents devenus braves à force de peur se coalisent pour réprimer les fous furieux et inaugurent le règne des imbéciles. Nous avons déjà vu cela.

Jusqu’à quel point les hommes sont-ils responsables de ces oscillations et de ces angoisses qui produisent tant de crimes, quel penseur oserait le dire ? On exècre Marat et l’on canonise Pie V.

Il est vrai que le terrible Ghisleri ne guillotinait pas ses adversaires, il les brûlait. Pie V était un homme austère et un catholique convaincu. Marat poussait le désintéressement jusqu’à la misère.

Tous deux étaient des honnêtes gens, mais c’étaient des fous homicides sans être précisément furieux. Or, quand une folie criminelle rencontre la complicité, d’un peuple, elle devient presque une raison terrible et quand la multitude, non désabusée, mais trompée d’une façon contraire renie et abandonne son héros, le vaincu devient à la fois un bouc émissaire et. un martyr. La mort de Robespierre est aussi belle que celle de Louis XVI. J’admire sincèrement cet affreux inquisiteur qui, massacré par les Albigeois, écrit sur la terre avec son sang, avant d’expirer : Credo in unum Deum !

La guerre est-elle un mal ? Oui sans doute, car elle est horrible. Mais est-ce un mal absolu ? La guerre, c’est le travail générateur des nationalités et des civilisations. Qui est responsable de la guerre ? Les hommes ? Non, car ils en sont les victimes. Qui donc ? Oserait-on dire que c’est Dieu ? Demande au conte Joseph de Maistre. Il vous dira pourquoi les sacerdoces ont toujours consacré le glaive ; et comment il y a quelque chose de sacré dans l’office sanglant du bourreau. Le mal c’est l’ombre, c’est le repoussoir du bien. Allons jusqu’au bout et osons dire que c’est le bien négatif. Le mal c’est la résistance qui affermit l’effort du bien ; et c’est pour cela que Jésus-Christ ne craignait pas de dire : Il faut qu’il y ait des scandales.

II y a des monstres dans la nature comme il y a des fautes d’impression dans un beau livre. Qu’est-ce que cela prouve ? Que la nature comme la presse sont des instruments aveugles que l’intelligence dirige ; mais, me direz-vous, un bon prote corrige les épreuves. Oui certes, et dans la nature c’est à cela que sert le progrès. Dieu, si l’on veut me passer cette comparaison, est le directeur de l’imprimerie et l’homme est le prote de Dieu.

Les prêtres ont toujours crié que les fléaux sont causés par les péchés des hommes, et cela est vrai puisque la science est donnée aux hommes pour prévoir et prévenir les fléaux. Si, comme on l’a prétendu, le choléra vient de la putréfaction des cadavres amoncelés à l’embouchure du Gange, si la famine vient des accaparements, si la peste est causée par la malpropreté, si la guerre est occasionnée si souvent par l’orgueil stupide des rois et la turbulence des peuples, n’est-ce pas vraiment la méchanceté, ou plutôt la bêtise des hommes qui est cause des fléaux ? On dit que les idées sont dans l’air et l’on peut dire en vérité, que les vices y sont aussi. Toute corruption produit une putréfaction et toute putréfaction a sa puanteur spéciale. L’atmosphère qui environne les malades est morbide et la peste morale a aussi son atmosphère bien autrement contagieuse. Un honnête coeur se trouve à l’aise dans la société des gens de bien. Il est serré, il souffre, il étouffe au milieu des êtres vicieux.
____________________________

Bibliographie

- Dogme et Rituel de la HAUTE MAGIE, Ed. Bussières, Paris V (anciennement Niclaus).
- Histoire de la magie, Guy Trédaniel, Paris V.
- La Clef des Grands Mystères, diffusion scientifique, Paris XVIII.
- Cours de Philosophie occulte (correspondance avec le Baron Spedialieri), Ed. de Mortagne, Canada.
- Le Grand Arcane ou l'occultisme dévoilé, Guy Trédaniel.
- Le Livre des Splendeurs (étude sur le Zohar), Guy Trédaniel.
- Les mystères de la Qabbale ou l'harmonie occulte des deux testaments, Guy Trédaniel.
- Clavicules de Salomon, Ed. Traditionnelles, Paris V (anciennement Chacornac).
- Fables et Symboles, Guy Trédaniel.
- Le livre des Esprits, Guy Trédaniel. (il ne s'agit pas de spiritisme)
- Les Portes de l'avenir, Ed. diffusion rosicrucienne.
- Le Livre des Sages, Ed. diffusion rosicrucienne.
-Paul Chacornac : Eliphas Lévi, rénovateur de l'occultisme en France, Ed. Traditionnelles, Paris V