mercredi 19 novembre 2025

Jacobus de Teramo – Litigatio Christi cum Belial, Strasbourg, 1461


 Jacobus de TeramoLitigatio Christi cum Belial, Strasbourg, 1461

La Litigatio Christi cum Belial est l’un des textes les plus singuliers et fascinants de la littérature théologique et juridique de la fin du Moyen Âge. Rédigé par Jacobus de Teramo (ou Giacomo da Teramo), un juriste et ecclésiastique italien du XIVᵉ siècle, l’ouvrage se présente comme une dispute judiciaire métaphorique entre le Christ et Belial, figure démoniaque représentant les forces du Mal.

Un procès cosmique

Le texte met en scène un véritable procès tenu devant un tribunal céleste.

  • Le Christ, incarnant la Justice divine et la Rédemption, est le plaignant.

  • Belial, archétype du chaos et de la tromperie, représente les droits supposés du Démon sur l’humanité.

L’œuvre reprend les formes du droit canonique et civil : présentation des arguments, citations de lois, interventions d’avocats célestes… Ce procédé permet à Jacobus de Teramo d'exposer, sous une forme vivante et parfois ironique, les grandes questions théologiques du Salut et de la lutte entre Bien et Mal.

L’édition de Strasbourg (1461)

L’impression de Strasbourg, datée de 1461, est particulièrement importante.
Elle se situe parmi les premières décennies de l’imprimerie européenne et témoigne de la popularité durable de ce texte, largement diffusé dès la fin du Moyen Âge. Les éditions strasbourgeoises se distinguent souvent par leurs ornements gothiques, leurs lettrines et, dans certains exemplaires, par des illustrations montrant la confrontation symbolique du Christ et du Démon.

Cette édition contribue à fixer la Litigatio comme un classique des “procès allégoriques” médiévaux, un genre où se mêlent religion, satire, droit et mystique.

Une œuvre entre théologie, dramaturgie et ésotérisme

La force du texte réside dans sa capacité à convoquer différents registres :

  • théologique, en exposant le dogme chrétien de la Rédemption ;

  • juridique, en utilisant les codes du procès médiéval ;

  • symbolique, par la représentation dramatique de l’affrontement entre lumière et ténèbres.

Cette dimension symbolique lui vaut une réception durable dans les milieux érudits, ésotériques et iconographiques, où l’œuvre est parfois interprétée comme une allégorie initiatique de l’âme humaine confrontée à ses propres forces d’ombre.