La Dissection des Âmes par Elisandre


Anthropologue de l'âme, Elisandre nous plonge au cœur des tourments les plus obscurs avec ces sept nouvelles pour un voyage au pays de la nécrophilie, de la folie, du cannibalisme et de la sorcellerie.
- Le Nécrophile - L'Antre de la souffrance expiatoire - Cire Roverac le Nécromant - La Belle et la Bête - Le Confessionnal - Eloge de la Cupidité - Eloge de la Gourmandise.
Prix : 9 euros

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CRITIQUE LITTÉRAIRE LA DISSECTION DES ÂMES par Patryck Fucini

Nous avons déjà parlé des éditions Hérésie.com dans nos news. Elles ont notamment édité trois recueils macabres de Francis Thievicz, ainsi qu'un petit livre sur le mystère de Rennes- le-Château, signé Elisandre.

C'est justement la même Elisandre qui sort aujourd'hui ce qui est à notre connaissance son premier recueil de nouvelles, LA DISSECTION DES AMES.

7 nouvelles horrifiques, parfois fantastiques et malsaines, comme on les aime à SUEURS FROIDES.

L'écriture est belle, souvent élégante et pleine d'un charme volontairement suranné. Nul doute qu'Elisandre doit apprécier nombre d'auteurs du XIXème siècle, début XXème. Certains de ses textes comme LE NECROPHILE ne dénoteraient pas, en effet, dans un numéro du remarquable BOUDOIR DES GORGONES, déjà chroniqué ici.

Regrettons seulement quelques coquilles ici ou là qui ne nuisent cependant en rien à la lecture d'un style constamment agréable, même s'il se perd parfois un peu dans des phrases trop longues, qui auraient peut-être méritées d'être scindées en deux.

Détails que cela tant l'ensemble de ce petit livre est enthousiasmant !

LE NECROPHILE est une histoire qui fait songer à Poe, pour l'atmosphère romantique mais délétère, davantage qu'à Jörg Buttgereit, que les estomacs fragiles se rassurent. La fin (humour noir si l'on veut) est la digne héritière de la chute d'une célèbre NUIT DES MORTS-VIVANTS.

Méchante, en revanche, L'ANTRE DE LA SOUFFRANCE EXPIATOIRE, qui s'inscrit dans la veine des torture porn mêlés d'auto-justice que sont LES SEPT JOURS DU TALION (un excellent Patrick Senécal adapté au cinéma), le film THE TORTURED (visiblement très inspiré de Senécal) ou encore LES MORSURES DE L'OMBRE, un thriller de Karine Giebel pour le moins efficace. Un beau salopard est capturé par une femme qui le torture. Pourquoi ? Vous le découvrirez en lisant ce qui restera comme une fort bonne variation sur le genre. Un genre qui en dit long sur l'état d'exaspération des braves ( ?) gens qui ne peuvent jamais rendre coup pour coup aux véritables ordures qui sèment le mal sur cette terre. Le concept ? Et si le Justicier par excellence Charles Bronson avait torturé au lieu de se contenter de flinguer ceux qui violèrent et assassinèrent les siens ? La morale de chacun jugera, mais ce type d'oeuvres ne peut laisser indifférent et invite à la réflexion.

SIRE ROVERAC LE NECROMANT est une belle histoire d'amour, pleine d'ironie... et de coeurs arrachés !

Elisandre ne semble pas porter dans son coeur les voyous et les malfrats compte-tenu de la façon dont ils finissent dans ses textes, ici comme dans le convaincant LA BELLE ET LA BETE (pour les amoureux des chiens).

Le sort des cupides et des incultes est d'ailleurs le même dans ELOGE DE LA CUPIDITE, une histoire de vampires, si l'on veut, aux personnages principaux réellement dignes d'intérêt, aussi peu recommandables soient-ils.

Autre péché capital qui a inspiré notre conteuse, la gourmandise a aussi droit à son éloge. On s'en doute, il est ici question de goules et de cannibalisme !

L'un des textes les plus intéressants est sans conteste LE CONFESSIONNAL. Les plus littéraires penseront à LA RELIGIEUSE de Diderot, les plus cinéphiles (tendance cinéma d'auteur) auront une pensée émue pour Rivette qui l'adapta... A SUEURS FROIDES, ce texte nous remet immanquablement en mémoire deux petits joyaux de la Nunsploitation, signés par l'immense Joe d'Amato : LES AMOURS INTERDITES D'UNE RELIGIEUSE et son quasi remake ON L'APPELLE SOEUR DESIR (toujours d'après Diderot, on n'en sort pas !).

Autant dire que la lecture du CONFESSIONNAL est particulièrement réjouissante !

Il n'y a pas à dire, on savait s'amuser dans certains couvents !