jeudi 30 octobre 2008
Howard Phillips Lovecraft
« Je ne participe jamais à ce qui m'entoure, je ne suis nulle part à ma place. »
Howard Phillips Lovecraft
Lovecraft est né à Providence, Rhode Island le 20 août 1890. C'est certainement à son enfance malheureuse qu'il doit l'inspiration de son oeuvre. Alors qu'il n'a que trois ans, son père est interné dans un hôpital psychiatrique où il décédera des suites de la syphilis, maladie dont sa mère est également atteinte. Il rédige ses premiers poèmes, ainsi que sa première nouvelle, La petite bouteille de verre (The little glass bottle) à l'âge de six ans, à 13 ans, Howard rédige une première nouvelle fantastique,"The Beast in the Cave".
Un bref séjour à New York lui donne l'occasion, à travers le cercle d'amateurs de fantastique qu'il fréquente, de publier un premier récit, "Dagon". Il y rencontre également sa femme, Sonia Green, dont il divorce rapidement.
De retour à Providence, Lovecraft s'installe avec ses tantes, rideaux tirés, il s'isole des autres, car il souffre d'une sensibilité à la lumière. Il imagine une cosmogonie fabuleuse de dieux, de créatures et de lieux étranges regroupés sous l'expression Mythe de Cthulhu, un terme inventé par l'écrivain August Derleth après sa mort et que l'on retrouve dans la plupart de ses textes. Les nouvelles qu'il écrit alors ne lui permettent pas de subvenir à son quotidien, mais il reste prolifique : en 1927 il rédige "Démons et Merveilles", "La couleur Tombée du Ciel", puis "L' abomination de Dunwich", "Celui qui chuchotait dans les ténèbres", "Les montagnes hallucinées", "Dans l'abîme du temps" et "Celui qui hantait les ténèbres".
Lovecraft a échangé une correspondance particulièrement abondante (80 000 lettres recensées) avec des auteurs des quatre coins des Etats-Unis. Il eut notamment une grande influence sur Robert Bloch, l'auteur de "Psychose".
Atteint d'un cancer de l'intestin, Lovecraft s'éteint dans une chambre d'hôpital de Rhode Island, le 15 mars 1937, il n'était âgé que de 47 ans.
Son oeuvre symptomatique d'un profond malaise ne connaîtra le succès qu'après sa mort grâce au travail dévoué de ses admirateurs. Il est aujourd'hui considéré comme l'héritier d'Edgar Allan Poe.
Les romans de Lovecraft présentent le monde comme un univers hanté par des forces anciennes et bannies, attendant l'heure de leur retour, dont l'archétype est le Léviathan. Les monstres les plus récurrents sont Cthulhu, Yog-Sothoth, Azathoth ou Nyarlathotep. Le Necronomicon, ouvrage supposément écrit par l' « Arabe fou » Abdul al-Hazred, est aussi un « personnage » important. L'Appel de Cthulhu, publié en 1926, est la pièce angulaire de cet univers. Il n'est guère difficile de percevoir sous les noms de ses monstres des réminiscences de créations beaucoup plus anciennes telles Gog et Magog ou Astaroth, thèmes sur lesquels l'auteur a pu greffer ses étranges fantaisies.
On discerne des thèmes rémanents dans son œuvre, tels que la folie dont étaient touchés ses parents, la futilité des croyances, la dégénérescence, les unions contre nature, la xénophobie, l'impression générale que le monde dans lequel il vivait n'était qu'un leurre désagréable et immonde. Hanté par de nombreuses phobies, il ne pouvait supporter la proximité de la mer, ni même les objets en provenant, tant était grande son aversion pour l'élément primordial de la vie. Le froid le rendait malade et les seuls êtres vivants qui semblent ne pas lui avoir déplu étaient les chats, il en avait toujours plusieurs chez lui pour seule compagnie. Il avouait souvent qu'il aurait préféré vivre au XVIIIe siècle.
LA TERRE NOTRE MÈRE (H.P. Lovecraft)
Une nuit, me promenant, je descendis
Vers une vallée profonde, silencieuse et humide,
L'air stagnant était imprégné d'une corruption
Et d'une froideur qui me soulevaient le cœur je défaillais.
Les arbres nombreux de chaque côté
Ressemblaient à une bande d'effroyables gobelins
Et les branches se découpant sur le ciel se réduisant
Prenaient des formes que je redoutais... j'ignore pourquoi.
Je m'élançai plus avant, j'avais l'impression de chercher
Confusément une chose perdue comme la joie ou l'espoir.
Pourtant, en dépit de mes efforts,
Je ne trouvai rien, hormis les fantômes du désespoir.
Les murailles se resserraient comme je continuais
Et bientôt, de la lune et des étoiles privé,
J'étais blotti dans une crevasse rocheuse
Si profonde et ancienne que la pierre
Exhalait l'odeur de choses originelles et inconnues.
Mes mains explorant s'efforçaient de retrouver
Les traits de la paroi de cette vallée,
Lorsque, au sein de leur floraison, elles semblèrent
Palper des contours terrifiants pour mon esprit.
Mes yeux se plissant aucune forme
N'auraient pu voir ou reconnaître ;
Car ce que je touchais parlait de temps
Trop lointains pour le passage fugace de l'homme.
Les lichens s'accrochant à la roche, moites et blanchis,
M'interdisaient de lire l'histoire très ancienne
Mais une eau cachée, suintant doucement,
Chuchota des récits que je n'aurais pas dû connaître.
« Mortel, éphémère et hardi,
De grâce garde pour toi ce que je dis,
Pourtant songe parfois à ce qui a été,
Et aux scènes que ces rochers s'effritant ont contemplées :
Déjà anciennes avant que ta trace chétive
Survienne dans une moindre splendeur,
Il y eut des créatures vivantes qui vivent encore,
Bien qu'elles semblent mortes pour les êtres humains.
Je suis la voix de ta Terre Mère,
D'où naissent toutes les horreurs.»
« Toutes mes histoires, même si elles n'ont aucun rapport entre elles, se rattachent à une tradition, une légende fondamentale selon laquelle ce monde a été peuplé autrefois par les êtres d'une autre race ; adeptes de la magie noire, ils ont perdu leur emprise sur cet univers et en ont été bannis mais ils continuent à vivre au dehors et sont toujours prêts à reprendre possession de la Terre. »(Lovecraft)